Jeudi Saint • 1er avril 2021
Les lectures que nous venons d’entendre, sœurs et frères, ont ceci en commun : toutes elles nous parlent d’un repas et de « faire mémoire ».
Faire « mémoire » ce n’est pas simplement se souvenir d’un évènement quelconque, c’est bien plus que cela, c’est véritablement commémorer et surtout actualiser un évènement important.
C’est ce que font, par exemple, les époux qui chaque jour, et plus particulièrement le jour anniversaire de leur mariage, se redisent « oui, je veux être ta femme, je veux être ton mari, et t’aimer fidèlement », actualisant, renouvelant celui qu’ils se sont dit mutuellement lors de leur mariage.
C’est ce que font les Evêques, les prêtres lorsqu’ils célèbrent l’Eucharistie, reprenant les paroles et les gestes de Jésus lors de son dernier repas avec ses disciples, instituant par-là le Sacrement de l’Eucharistie, ce que justement nous célébrons, nous commémorons ce soir.
C’est aussi ce que font les diacres configurés, par leur ordination, au Christ « Serviteur » lavant les pieds de ses disciples, dans le cadre de leur ministère diaconal centré justement sur le service du frère et plus particulièrement des plus pauvres et des plus démunis.
Ceci dit, sœurs et frères, ce soir je voudrais plus particulièrement m’attarder quelques instants sur l’extrait de l’Evangile selon St Jean que nous venons d’entendre car, s’il nous parle lui aussi de ce dernier repas que Jésus-Christ a pris avec ses apôtres alors qu’Il allait vivre sa Passion, contrairement aux autres Evangélistes qui rapportent les gestes de la fraction du pain, l’Evangéliste Jean n’en fait pas mention mais nous parle plutôt de l’amour infini de Jésus-Christ pour nous quand il écrit : « sachant que l’heure était venue pour lui de passer de ce monde à son Père, Jésus, ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, les aima jusqu’au bout. », liant ainsi l’institution de l’Eucharistie à un geste fort d’amour de Jésus pour ses disciples : celui du lavement des pieds.
Regardons donc de plus près ce geste et ces paroles de Jésus et essayons de comprendre ce qu’à travers ceux-ci le Christ nous dit à nous aujourd’hui qui en faisons mémoire. Et pour cela retournons quelques instants au temps de Jésus.
En ce temps-là, il n’y avait ni trottoir, ni route bien macadamisée. On marchait pieds nus, au mieux avec des sandales, dans la poussière et très souvent sous le soleil. Laver les pieds des invités lorsqu’ils arrivaient à la maison était dès-lors un geste d’accueil, souvent fort apprécié par celui qui, en plus de voir ses pieds nettoyés, bénéficiait de la fraîcheur de l’eau.
Laver les pieds sales de quelqu’un ce n’est certes pas une tâche très agréable, raison pour laquelle cette tâche ingrate était confiée à un serviteur et pas n’importe lequel puisqu’elle était confiée au plus petit, au dernier de ceux-ci !
Or, ici, nous voyons que c’est Jésus Lui-même qui enlève son vêtement, se ceint d’un tablier et se met à laver les pieds de ses disciples
Jésus, le maître de maison, plus encore le Fils de Dieu, autrement dit Dieu Lui-même, se met à la place du plus petit des serviteurs, au point que, face à cette situation inédite, l’impétueux St Pierre réagira.
Mais pour laver les pieds de ses disciples, Jésus se met à genoux devant eux.
Se mettre à genoux devant quelqu’un ce n’est pas rien. C’est reconnaître que la personne devant qui on s’agenouille est quelqu’un de plus important que soi, de plus grand que soi.
Nous pouvons donc déjà dire qu’au-delà de ce geste, en se mettant à genoux devant ses disciples, Jésus leur dit, comme Il nous le dit à nous qui sommes ses disciples aujourd’hui : vous êtes importants à mes yeux, vous êtes importants aux yeux de Dieu.
De plus, en s’abaissant ainsi devant ses disciples, Jésus ne regarde pas ses disciples de haut, mais au contraire, Il lève sur eux son regard.
Avons-nous conscience, sœurs et frères, qu’en faisant cela, Jésus nous révèle, nous exprime la manière dont Dieu nous considère : non pas comme des esclaves, comme des serviteurs, mais bien comme des personnes très importantes, des personnes ayant beaucoup de valeur à ses yeux.
De même en lavant les pieds de ses disciples, Jésus leur fait également du bien. Il prend soin de leur corps. Ainsi par ce geste, Il invite à ses disciples, et à travers eux Il nous invite nous : à faire attention à nous, à prendre soin de notre corps, à le respecter.
Nous pourrions peut-être nous interroger sur ce que Jésus veut nous faire comprendre ! La réponse à notre questionnement nous la trouvons dans notre baptême. Par celui-ci en effet nous devenons, comme le dit l’apôtre Paul dans sa 1ère lettre aux Corinthiens au chapitre 3 : « Temple de Dieu et l’Esprit de Dieu habite en vous ( 1 Co 3, 16-17 ). « Temple de Dieu », maison où le Seigneur vient demeurer.
Que nous soyons « Temple de Dieu », raison pour laquelle nous devons prendre soin de notre corps et le respecter, nous pouvons sans doute mieux en prendre conscience lorsque nous communions au Corps du Christ comme nous le ferons dans quelques instants.
Pour terminer, je voudrais encore attirer votre attention sur les paroles Jésus à ses disciples après leur avoir lavé les pieds : « Si donc moi, le Seigneur et le Maître, je vous ai lavé les pieds, vous aussi, vous devez vous laver les pieds les uns aux autres. C’est un exemple que je vous ai donné afin que vous fassiez, vous aussi, comme j’ai fait pour vous. »
En mettant en exergue comment, le soir de sa Passion, le Christ-Jésus a lié la fraction du Pain, dont les évêques et les prêtres sont plus particulièrement les ministres, au lavement des pieds, dont ici se sont plutôt les diacres qui en sont plus particulièrement les ministres, l’Evangéliste Jean, nous montre combien ce n’est pas uniquement eux, les évêques, les prêtres et les diacres, qui sont concernés par les gestes et les paroles de Jésus-Christ, mais bien nous tous, comme baptisés et en qualité de disciples, et qui que nous soyons, qui sommes directement concernés par ce que Jésus ordonne à ses disciples.
Autrement dit, il ne s’agit pas pour nous de venir simplement à la messe chaque dimanche, de communier régulièrement, mais bien, comme Jésus l’a fait pour les siens en leur ordonnant de faire de même, d’être nous aussi attentifs les uns aux autres. Nous devons veiller à respecter les autres, ne pas leur faire de mal mais au contraire leur faire du bien, … veiller à les aimer comme Il nous aime.
Sœurs et frères, demain, ici même à 15h00, nous prierons le Chemin de Croix et à 19h30 nous ferons mémoire de la Passion et de la Mort de Jésus. Jésus qui, dans un acte d’amour inouï pour nous, a offert sa vie afin que nous vivions de la vraie vie, de la Vie éternelle, puissions-nous toujours, comme Il nous l’a demandé : agir les uns envers les autres comme Lui-même a agi envers nous.
Diacre Jean-Pol Druart