Vendredi de la 33e semaine du Temps Ordinaire
Année paire • de la férie

Première lecture : Ap 10, 8-11
Psaume : Ps 118 (119), 14.24, 72.103, 111.131
Évangile : Lc 19, 45-48

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Homélie

L’épisode de l’expulsion des vendeurs du Temple est rapporté par les quatre évangélistes. La version de saint Luc que nous venons d’accueillir est la plus brève. La scène y est concentrée au maximum pour insister sur la phrase : « Ma maison sera une maison de prière. »

La prière, spécialement la prière de Jésus, est un thème récurrent, constant chez Luc. Que de fois n’y lit-on pas : Jésus était en prière. Je lis Lc 5,16 : « Et lui se retirait dans les lieux déserts et il priait. » Je lis encore Lc 6,12 : « En ces temps-là, Jésus s’en alla dans la montagne pour prier et il passa la nuit à prier Dieu. »

Le troisième évangéliste montre souvent Jésus en prière, et des cinq prières de Jésus qu’il mentionne, trois lui sont propres : la prière de Pierre afin que sa foi ne défaille pas (cf. Lc 22,31-32) ; la prière de Jésus pour ses bourreaux : « Père, pardonne-leur car ils ne savent pas ce qu’ils font » (Lc 23,34) ; et la prière sur la croix : « Père, entre tes mains, je remets mon esprit » (Lc 23,46).

Jésus, nous dit et redit saint Luc, prenait le temps de la prière. Frères et sœurs, sans l’accueil de Dieu qu’est la prière, comment pourrions-nous être porteurs de Dieu ? Comment nos vies pourraient-elles avoir couleur de Dieu ?

Facilement nous vivons dans la dispersion au point d’en perdre un peu, beaucoup, la vie intérieure. Facilement nous nous inquiétons et nous nous agitons pour bien des choses. Mais cela ne nuit-il pas lorsque l’urgent prend le pas sur l’important ?

Nous courons beaucoup. Mais ne devons-nous pas réapprendre à marcher ? Et même à nous asseoir. N’y a-t-il pas un devoir de s’asseoir ? Aussi de s’asseoir auprès du Seigneur ?

Sans le lien avec le Seigneur qu’est la prière, toutes nos courses ne sont-elles pas vaines ? Je confie à votre méditation ce petit conte suggestif.
Une jeune araignée, portée par son fil à travers les airs, fut un jour arrêtée par la cime d’un arbre très élevé. Elle inspecta les environs et secréta un fil nouveau qui la déposa sur un buisson. Elle tissa sa toile en prenant appui sur le fil qui lui avait servi à descendre et en fixant les autres coins aux branches du buisson.

La toile attrapait les mouches à merveille et, des insectes capturés la nuit, l’araignée faisait deux parts : la première était destinée au petit déjeuner, la seconde, patiemment momifiée, grossissait ses réserves. Mangeant à sa faim, notre jeune araignée devint toute ventrue.

Un matin, elle se réveilla sur un paysage noyé de brouillard. Pas une mouche à l’horizon. Cela la mit de mauvaise humeur. Elle fit le tour de sa toile, répara quelques déchirures et arriva bientôt au fil qui partait de l’extrémité supérieure de sa toile et conduisait à la cime de l’arbre. Mais elle n’en voyait pas le bout qui se perdait dans les hauteurs. Où pouvait bien conduire ce fil élancé vers le ciel ? Et à qui servait-il ? Elle ne se rappelait de rien. D’un coup sec et d’une seule morsure, elle le cassa. Au même moment, la toile s’affaissa et l’araignée se retrouva inerte au milieu du buisson d’épines, enveloppée dans les débris enchevêtrés de ce qui avait été son beau travail.

Ami, amie, sauras-tu entendre le message de notre sœur l’araignée ?

+ Pierre Warin,
évêque de Namur