Était-ce le moment opportun pour accueillir une nouvelle traduction du Missel romain alors que les communautés se remettent à peine des affres de l’épidémie ? Était-ce nécessaire de changer des textes bien connus par les pasteurs et les fidèles ? N’est-ce pas simplement une opération commerciale pour remplir les caisses de l’éditeur ? Des questions que beaucoup se posent à l’annonce de la parution de la nouvelle traduction française du Missel romain.
Ces questions qui nous arrivent ces dernières semaines sont bien naturelles et légitimes. La traduction du Missel romain que nous employons encore aujourd’hui remonte aux années 1970. Elle est la
traduction de la 2e édition typique – l’édition de référence en langue latine – de 1975, la 1ère datant de 1970. La traduction de 2021 est le fruit d’un long travail de l’édition typique de 2002, amendée en 2008.
Si la structure de la messe (l’Ordo missæ) reste celle que l’on connaît depuis le renouvellement de la liturgie à la suite du concile Vatican II, il était devenu nécessaire de mettre à jour le calendrier des saints, notamment. On notera également l’ajout de pas moins de 28 prières sur le peuple (super populum) pour la fin de la messe, 4 formules alternatives pour l’anamnèse (et non plus 3) ainsi que 4 formules d’envoi différentes, ou encore la traduction complète de l’Orate fratres.
Un des points d’attention concerne le registre de langage employé. Les traducteurs ont eu à coeur de traduire le texte latin dans un langage audible aujourd’hui et qui respecte une triple fidélité : fidélité au texte original, fidélité en particulier à la langue dans laquelle le Missel est traduit et fidélité à l’intelligence du texte pour ceux à qui il est destiné (Magnum principium, 2017).
Et si cette nouvelle traduction était aussi une chance pour nos communautés ? Certes, elle bousculera bien des habitudes, mais ce sera surtout l’occasion pour l’ensemble de nos communautés chrétiennes, et pour tous les acteurs de la liturgie, de redécouvrir le sens profond de l’eucharistie, « source et sommet de toute la vie de l’Église » (LG 11). C’est l’occasion de proposer aux équipes liturgiques et à nos communautés d’ouvrir le missel et de travailler ensemble les textes proposés et leurs sources.
Puisque la messe est la prière de toute l’Église et pas seulement celle des ministres ordonnés, puisse le Missel romain lui aussi ne pas se réduire à une sorte de « grimoire » réservé aux seuls prêtres, mais bien être le livre de prière de toute la communauté, dans sa richesse et sa diversité. Cela passera par un approfondissement et une appropriation des « mots de la messe ».
[Article paru dans la revue Communications du diocèse de Namur, octobre 2021, p. 20.]